LES AUGMENTATIONS TARIFAIRES DU MANDANT

LES AUGMENTATIONS TARIFAIRES DU MANDANT

L’arrêt de la Cour d’appel de Besançon du 1er août 2023 (RG n° 21/01781) est un exemple intéressant des effets de l’intérêt commun sur la liberté tarifaire du mandant de l’agent commercial. 

Comme le rappelle l’article L134-4 du Code de Commerce, le contrat d’agence commerciale est fondamentalement un mandat d’intérêt commun impliquant un devoir de loyauté renforcé des parties. Son but est la constitution et l’exploitation en commun d’une part de marché, chacun des partenaires bénéficiant des efforts de l’autre : pour le mandant en réalisant un chiffre d’affaires et pour l’agent par la perception de commissions.

Chacune des parties au contrat doit donc s’abstenir de quelque comportement que ce soit qui puisse porter atteinte à la clientèle commune ainsi qu’à l’entreprise de son partenaire.

De plus, il est essentiel de rappeler que l’agent commercial est exclusivement rémunéré par des commissions sur le chiffre d’affaires qu’il réalise avec la clientèle qu’il a constituée ou entretenue pour le compte de son mandant et que toute atteinte à cette part de marché entraîne pour lui, ipso-facto, une perte correspondante de rémunération.

Si bien entendu, dans le cadre de l’exercice du contrat d’intérêt commun, le mandant décide seul de l’organisation de son entreprise et notamment de sa politique tarifaire, il doit également concilier ses propres intérêts avec ceux de son agent commercial, en prenant toute mesure utile pour préserver la clientèle ou la part de marché traitée par l’agent.

A défaut, la jurisprudence considère que le mandant rompt l’intérêt commun et viole les dispositions de l’article L134-4 du Code de Commerce en cessant de mettre l’agent commercial en mesure d’exécuter son mandat. C’est le cas par exemple lorsque le mandant décide unilatéralement des hausses tarifaires importantes qui dissuadent la clientèle de continuer à traiter avec l’agent commercial (CA Aix-en-Provence 5 septembre 2019 SAS Lebrun/Prime, arrêt n° 2019/298 ; 13 février 2002 Anglès/Editions Quo Vadis, n° 88/2002) ou provoque des situations de blocages de négociations lors de la conclusion des accords annuels avec les centrales d’une enseigne de grande surface alimentaire (Caen 9 mai 2019 Glineur/Rey Surgelés, n° 16-274).

Dans son arrêt du 1er août 2023, la Cour d’appel de Besançon applique ces principes en considérant que les augmentations de tarifs décidées par le mandant qui avaient fait perdre à l’agent commercial ses deux principaux clients et qui impactaient donc significativement son activité l’autorisait à solliciter le prononcé de la résiliation judiciaire de son mandat qui lui ouvrait droit au règlement de l’indemnité légale de cessation de mandat prévue par l’article L134-12 du Code de Commerce.

En conclusion et si le commettant de l’agent commercial demeure libre de sa politique tarifaire, c’est bien à la condition de prendre toute mesure utile pour permettre à l’agent commercial de conserver la part de marché exploitée en commun.

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