LA TOLERANCE DU MANDANT

LA TOLERANCE DU MANDANT

Il est de principe jurisprudentiel constant que le mandant ne peut reprocher à l’agent, en tant que faute grave, des faits dont il a eu connaissance antérieurement et qui n’ont pas motivé, de sa part, une résiliation pour faute grave du mandat de l’agent commercial.

En effet, la jurisprudence définit la faute grave comme celle qui « …porte atteinte à la finalité commune du mandat d’intérêt commun et rend impossible le maintien du lien contractuel ». La faute grave, privative d’indemnité, doit donc rendre immédiatement impossible la poursuite de la relation contractuelle. Dans ces conditions, des comportements connus depuis un certain temps par le mandant et tolérés par lui, ne peuvent être légitimement allégués ensuite par ce dernier à l’appui d’une prétendue faute grave (Cass. Com. 28 septembre 2018, n° 17-17743 ; 12 février 2013, n° 12-12371 ; 8 décembre 2009, n° 08-17749 ; 22 février 2005, n° 03-12753).

Ce principe vient d’être mis en œuvre par la Cour d’appel d’Aix-en-Provence dans un arrêt du 6 avril 2023 (SARL Galais BJ/SAS La Maille Française, n° 2023/47).

Dans cette affaire, la société mandante, n’avait eu de cesse, tout au long de l’exécution du mandat, d’adresser régulièrement à l’agent commercial des reproches d’insuffisance de prospection, de baisse de chiffre d’affaires, de non-réalisation des objectifs contractuels ou de représentation d’entreprises concurrentes. L’agent commercial avait systématiquement contesté, de façon extrêmement circonstanciée, les différents griefs qui avaient été ainsi formés à son encontre.

La Cour d’appel d’Aix-en-Provence a été amenée à constater que les divers reproches formulés par la société mandante n’avaient jamais été suivis du moindre effet et qu’ils avaient donc été tolérés par cette dernière. La Cour rejette donc la faute grave de l’agent commercial en considérant que : « …ces éléments, qui étaient connus de la part de la société La Maille Française depuis 2011 à 2013, et qui n’ont pas empêché cette société de poursuivre sa collaboration avec la société Galais BJ jusqu’en 2018, ne peuvent être constitutifs d’une faute grave en ce qu’ils n’ont pas empêché la continuation du contrat d’agence commerciale, chaque partie ayant conservé un intérêt manifeste à son exécution en dépit des griefs réciproques allégués ».

Cette décision mérite une pleine et entière approbation.

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