L’arrêt rendu par la Cour de Cassation le 22 juin 2022 (n° 21-11675) est l’occasion d’évoquer la façon dont l’agent commercial doit appréhender la fin de son mandat en raison du décès du gérant et associé unique de l’entreprise du mandant.
Dans cette affaire, la société mandante était constituée sous forme de EURL. A la suite du décès de son gérant et associé unique, l’agent commercial avait estimé que la poursuite de son mandat, du fait de la disparition du seul et unique animateur de la société mandante, était devenue impossible.
En application de l’article L134-13-2 du Code de Commerce, il avait constaté la rupture de son mandat et sollicité le versement de l’indemnité légale de cessation de mandat prévue par l’article L134-12 du même Code. Par un arrêt du 5 novembre 2020, la Cour d’appel de Grenoble avait jugé que le décès du gérant et associé unique de l’EURL ne rendait pas impossible la poursuite du contrat d’agence commerciale car, sauf stipulation contraire des statuts de la société, l’EURL n’est pas dissoute par le décès d’un associé et que dans cette hypothèse elle continue de plein droit entre ses ayants droit et héritiers et, le cas échéant, avec le conjoint survivant.
Dans ces conditions, elle avait débouté l’agent commercial de ses demandes en estimant que la rupture des relations contractuelles lui était exclusivement imputable. Cette décision est confirmée en tout point par la Cour de Cassation qui a considéré que la Cour d’appel de Grenoble avait légalement justifié sa décision.
La position des juges peut paraître surprenante car, comme tout le monde le sait, une petite entreprise, privée de son dirigeant et principal animateur, a bien peu de chance de pouvoir continuer son activité si les héritiers ou ayants droit du « de cujus » n’ont ni l’intention ni les moyens ni les compétences pour poursuivre l’activité. Si tel était le cas en l’espèce, l’agent commercial avait donc commercialement raison de considérer que son mandat ne pouvait plus être normalement exécuté, même si juridiquement la société continuait à exister.
Afin de préserver son droit à indemnité, l’agent commercial aurait dû invoquer, non pas la disparition de l’entreprise mandante, mais l’impossibilité dans laquelle cette dernière se trouvait, au mépris des dispositions de l’article L134-4 du Code de Commerce, de le mettre en mesure de poursuivre l’exécution de son mandat.
En effet, il suffisait à l’agent commercial de prouver que la société mandante ne pouvait plus normalement exécuter les ventes consécutives aux commandes qu’il était amené à lui transmettre pour pouvoir, sur le fondement de l’article L134-4 du Code de Commerce, prendre acte de la rupture de son mandat et obtenir le paiement de l’indemnité légale de cessation de mandat (CA Aix-en-Provence 5 septembre 2019 SAS Lebrun/Prime, arrêt n° 2019/298 ; Caen 9 mai 2019 Glineur/Rey Surgelés, n° 16-274 ; Aix-en-Provence 9 avril 2015 Comptoir Régional des Extincteurs/Demont, arrêt n° 2015/148 ; 11 décembre 2014, Teisseire/SA Caddy Strasbourg, arrêt n° 2014/510 …).