L’AGENT COMMERCIAL ET LA PROPRIÉTÉ DE LA CLIENTÈLE

Il arrive fréquemment que les agents commerciaux utilisent improprement la notion de propriété de clientèle pour évoquer les différents aspects de la patrimonialité de leur mandat. En effet, cette valeur est essentiellement fondée non pas sur la propriété ou l’exploitation d’une clientèle mais sur la qualité de mandataire de l’agent commercial. Fondamentalement, ce dernier est un mandataire d’intérêt commun qui visite la clientèle pour réaliser avec elle des opérations au nom et pour le compte de son mandant. Il ne conclue donc pas ces opérations pour son propre compte car elles produisent leurs effets juridiques entre le mandant et les clients avec lesquels l’agent commercial n’a donc aucun lien de droit. Pour l’agent commercial, il ne peut donc exister de propriété de la clientèle, ce critère étant même utilisé par la Cour de Cassation pour le distinguer d’autres professions (Cass. Com. 21 février 2012, n° 11-14974 ; 26 février 2008, n° 06-20772). L’agent commercial n’est donc assurément pas propriétaire d’une clientèle. De même, en cas de cessation amiable ou judiciaire de son mandat, l’indemnisation qui lui est versée par le mandant   ne relève pas d’un « rachat de clientèle » mais de l’indemnisation du préjudice subi par l’agent commercial du fait de la perte de son mandat. Elle est prévue par l’article L134-12 du Code de Commerce et destinée à compenser la perte du potentiel de commissions attaché à la part de marché développée en commun. Selon la Cour de Cassation, elle répare la perte de la rémunération à laquelle l’agent pouvait raisonnablement s’attendre en provenance de la part de marché développée en commun (Cass. Com. 16 octobre 2001, n° 99-10271 ; 9 janvier 2001, n° 98-11313 ; 29 février 2000, n° 97-13220). Enfin, lorsque l’agent commercial décide de cesser son activité en la cédant à un autre agent, il ne s’agit pas d’une « vente de clientèle » mais de la cession du mandat à un successeur prévue par l’article L134-13-3 du Code de Commerce. Les clients ne sont donc pas vendus mais c’est la propriété du mandat qui est transférée dans le cadre de l’exercice du droit de présentation d’un successeur. Si sa personne est agréée par le mandant, il se trouve alors investi de tous les droits et obligations découlant du mandat ainsi cédé.

Il faut donc bannir du vocabulaire professionnel la notion de clientèle qui vient inutilement perturber la perception des institutions juridiques qui viennent d’être rappelées pour la réserver exclusivement à la zone de chalandise visitée.

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