RÉFÉRENCEMENT ET AGENCE COMMERCIALE

L’arrêt qui vient d’être rendu par la Cour d’appel de Caen le 9 mai 2019 (Glineur/Rey Surgeles, n° 2016/10274) apporte une nouvelle illustration de l’enjeu très important que représentent les référencements pour les agents commerciaux agissant auprès de la grande distribution et des autres acteurs du commerce intégré.

Ces enseignes imposent à leurs fournisseurs des procédures de référencement des produits auprès de leurs centrales sans lesquelles ils ne peuvent être offerts à la vente auprès des adhérents ou magasins de l’enseigne. L’existence du référencement et son maintien conditionnent donc la pérennité du volant d’affaires entre le mandant et l’enseigne, et donc la part de marché traitée et exploitée par l’agent commercial.

Dans un premier temps, les juridictions se sont interrogées sur l’influence du process de référencement sur la qualité d’agent commercial. Les mandants soutenant qu’ils privaient l’agent de son pouvoir de négociation, les juges ont été amenés à considérer que « …la circonstance que les référencements nationaux soient traités directement par la société… n’empêche aucunement le rôle de négociation et de représentation… [de l’agent commercial] au sein du secteur qui lui est confié » (CA Rennes 2ème Chambre 1er mars 2005, Champagne Montraudon/DFR : Journagence n° 77 du 12 décembre 2005). Dans le cas où l’agent était précisément chargé par le mandant des référencements auprès des centrales, les juges ont également reconnu que les tâches en découlant caractérisaient l’exercice du pouvoir de négociation propre aux agents commerciaux en constatant que l’agent « …avait conduit des réunions de négociations des prix avec des clients… et leur avait proposé à la vente des produits de cette société et pour le compte de celle-ci » (Cass. Com. 3 avril 2012, n° 11-13527) ou bien encore qu’il « …organisait des entretiens avec  les acheteurs des différentes enseignes, proposait l’implantation des produits… dans les magasins appartenant à ces enseignes, se rendait dans les magasins, formulait des offres commerciales, proposait des catalogues de produits, des délais de livraison, des volumes et des prix… » (Cass. Com. 15 mars 2017, n° 15-18434).

Il ne fait donc plus de doute aujourd’hui que le commerce intégré (la grande distribution) est compatible avec l’intervention des agents commerciaux.

Cela est tellement vrai que la jurisprudence prend en compte les référencements pour apprécier si le mandant exécute l’obligation qui lui est faite par l’article L134-4 du Code de Commerce, de mettre l’agent commercial en mesure d’exécuter son mandat. Elle a été ainsi amenée à considérer qu’un mandant se rendait coupable d’une rupture du mandat en provoquant le déréférencement de ses produits par refus de régler à la centrale les bonifications de fin d’année découlant du référencement et sans fournir à l’agent les moyens nécessaires à la reconstruction de sa part de marché (CA Aix-en-Provence 5 septembre 2012, Vaissié/Lecico France, arrêt n° 2012/324). Dans son arrêt du 9 mai 2019, la Cour d’appel de Caen estime également que le mandant manque à l’obligation prévue par l’article L134-4 du Code de Commerce en ne fournissant pas à l’agent commercial les instructions nécessaires pour lui permettre de mener à bien les négociations annuelles en centrale dont il l’avait chargé en provoquant ainsi des situations décrédibilisantes de blocages avec les clients.

Les référencements font donc partie intégrante de la part de marché exploitée en commun. Chacune des parties doit donc s’abstenir de quelque comportement que ce soit susceptible de porter atteinte audit référencement.

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