De plus en plus souvent les mandants demandent à leurs agents commerciaux d’utiliser le CRM de l’entreprise dans leurs relations avec la clientèle. Rappelons qu’il s’agit de logiciels de gestion de la relation client (Customer Relationship Management) destinés à collecter et à analyser les informations relatives aux clients pour optimiser l’offre du mandant. Mais leur utilité, eut égard à la taille de l’entreprise ou à son activité n’est pas toujours avérée et leur qualité est inégale, certains d’entre-deux nécessitant la saisie d’un nombre excessif d’informations avant de pouvoir enregistrer une commande.
En outre, les agents commerciaux sont multi mandants et souvent seuls à visiter la clientèle et il ne dispose donc pas forcément de suffisamment de temps pour saisir les informations des différents CRM utilisés par leur mandant. Il arrive donc fréquemment que l’agent commercial s’interroge sur la légitimité juridique d’un refus de sa part d’utiliser le CRM d’un mandant.
En fait, il faut concilier le principe de l’indépendance de l’agent commercial avec le devoir d’information qu’il a envers son mandant. Etant un professionnel indépendant, l’agent est totalement libre de l’organisation de son entreprise et des méthodes de traitement de sa relation client. Mais, en sa qualité de chargé d’affaires permanent du mandant, il a également envers lui un devoir d’information prévu par les articles L134-3 et R134-4 du Code de Commerce.
Mais la nature et le contenu des informations dont a besoin le mandant varient selon le secteur de distribution concerné et il n’existe pas des définitions légales des informations que doit communiquer l’agent commercial.
Il appartient donc à l’agent et au mandant de s’accorder pour définir contractuellement la nature, la forme et la fréquence des informations que devra communiquer l’agent. Si le mandant estime indispensable l’usage par l’agent commercial de son CRM, il faudra prévoir une clause faisant obligation à l’agent commercial de l’utiliser.
En présence d’une telle clause, le refus de l’agent commercial d’utiliser le CRM pourrait être assimilé à une faute grave, privative d’indemnité au sens de l’article L134-13-1 du Code de Commerce (Cass. Com. 5 juillet 2017 n° 016-14810).
En revanche, en l’absence de stipulation, le principe de la liberté d’organisation de l’agent commercial reprend le dessus. Ainsi, le mandant ne peut légitimement reprocher à l’agent commercial d’avoir manqué à ses obligations, sans l’avoir mis préalablement en demeure de s’exécuter ou de lui communiquer les informations nécessaires à l’exécution du mandat. La jurisprudence considère en effet que si le contrat ne définit pas clairement le contenu de l’information à la charge de l’agent, et l’absence de relance ou de mise en demeure faite à l’agent de transmettre les informations, il n’est pas possible de lui reprocher la commission d’une faute grave privative d’indemnité (CA AIX-EN-PROVENCE 10 septembre 2009 SAS Edena/Majault, arrêt n° 2009/336 ; 27 novembre 2008 Thorel/SAS Papeterie du Rhin, arrêt n° 2008/423 ; 14 septembre 2006 Jaunay/Charcurhin, arrêt n° 2006/420).
Il faut ajouter enfin que ces difficultés peuvent être écartées lorsque l’agent commercial utilise déjà son propre CRM pour traiter les données clients qu’il utilise dans sa prospection. Il lui est alors facile de proposer à ses mandants de partager avec eux, tout ou partie des informations client qu’il détient.