L’exercice de l’activité d’agence sans contrat écrit est favorisé par la simplicité et la souplesse du statut juridique d’agent commercial. En effet, l’existence d’un contrat écrit n’est pas une condition à la reconnaissance du statut. Il s’agit d’un contrat consensuel, qui peut donc être verbal, et dont la preuve peut être rapportée par tout moyen. En cas de litige, il suffit aux juges de constater la réunion des éléments caractéristiques du mandat d’agence commerciale pour reconnaître le statut d’agent (Cass. Com. 27 septembre 2017, n° 0016-11507 ; 20 mai 2008, n° 07/12234 ; 10 décembre 2003, n° 01-11923). De plus, les dispositions de la loi du 25 juin 1991 relatives aux rapports entre les agents commerciaux et leurs mandants, intégrées dans l’article L134 du Code de Commerce, institue une organisation minimale de la relation entre l’agent et son commettant en matière de loyauté, d’information, de droit à commission, de cessation de mandat et d’indemnisation.
Il arrive donc souvent que des agents commerciaux interviennent pour des mandants sans contrat écrit, ce qui présente à la fois des avantages et des inconvénients.
Le premier avantage à cette situation est que l’essentiel des dispositions de l’article L134 du Code de Commerce est favorable à l’agent commercial et que pour y déroger, il faut nécessairement établir un écrit. Seule une stipulation contractuelle peut mettre à la charge de l’agent une clause d’objectif, une obligation de compte-rendu ou de rapport d’activité écrit, le priver des commissions sur toutes les affaires faites sur son secteur ou avec la clientèle qui lui est confiée, mettre à sa charge une clause de non-concurrence post-contractuelle, une clause compromissoire ou une clause attributive de compétence. Dans l’hypothèse où il s’agit d’un mandat d’agence commerciale international unissant un agent français à un mandant étranger, la plupart des traités internationaux et des systèmes nationaux de conflits de loi retiennent la primauté de l’application de la loi choisie par les parties. Autrement dit, en cas de litige entre l’agent et le mandant, les juges doivent rechercher et appliquer la loi à laquelle des parties ont décidé de soumettre la convention. Compte tenu de la très grande diversité des statuts juridiques offerts aux agents commerciaux par les différents droits étrangers, ce choix est loin d’être anodin et peut même
très lourdement pénaliser les intérêts de l’agent commercial. Ainsi, et même dans l’Union européenne où le statut juridique de l’agent commercial a été initié par la directive du Conseil du 18 décembre 1986 (86/653/CEE), d’importantes disparités subsistent en matière d’indemnité de cessation de mandat : la France a conservé un système fixant l’indemnité de cessation de mandat à l’équivalent de deux ans de commissions alors que les autres états membres ont opté pour un mécanisme différent fixant schématiquement l’indemnité à l’équivalent de 1 an de commissions calculée sur la moyenne des commissions perçues au cours des 5 dernières années d’exécution du contrat. En l’absence de choix écrit entre les parties d’une loi applicable ou d’une juridiction compétente, les juges français se déclareront compétents et appliqueront la loi française.
Mais les inconvénients à ne pas disposer de contrat écrit sont également nombreux. Ainsi, lorsque l’agent sollicite son inscription au Registre Spécial des Agents Commerciaux, qui est obligatoire, il doit fournir un exemplaire de son contrat en application de l’article A134-2 du Code de Commerce et s’il ne dispose pas de contrat, il ne peut donc s’immatriculer. De même, l’absence d’écrit peut rendre très difficile la preuve de l’accord des parties s’agissant notamment du territoire, de la clientèle, du montant, du fait générateur et de l’exigibilité des commissions. C’est notamment le cas lorsqu’un litige survient prématurément avec le mandat et qu’il n’existe pas encore suffisamment de ventes réalisées dont l’étude des modalités permet de déduire l’accord des parties sur la nature ou l’étendue du champ contractuel ou sur le droit à commission. Naturellement, l’absence d’écrit ne facilite pas non plus la transmission du mandat par l’agent à un successeur, qui lui est permise en application de l’article L134-13-1 du Code de Commerce. Cette transmission est assimilée à une cession de mandat et l’acquéreur souhaitera légitimement disposer de la preuve écrite de l’existence du mandat qu’il va acquérir.
C’est donc avec une remarquable clairvoyance que les rédacteurs de la loi du 25 juin 1991 ont anticipé ces difficultés en prévoyant dans son article 2 (désormais L134-2 du Code de Commerce) que chacune des parties a le droit, sur sa demande, d’obtenir de l’autre partie un écrit signé mentionnant le contenu du contrat d’agent commercial, y compris celui de ses avenants.
Si grâce à l’exercice de ce droit l’agent pourra régulariser sa situation vis-à-vis du Registre Spécial des Agents Commerciaux ou sécuriser l’acquéreur en cas de vente de carte, il ne lui permettra certainement pas de surmonter un désaccord majeur avec le mandant qui est d’ailleurs souvent celui par la faute duquel aucun contrat n’avait été originairement signé.