La chambre commerciale de la Cour de Cassation par un arrêt du 16 novembre 2022 (n° 21-17423) a modifié notablement sa jurisprudence en matière de faute grave de l’agent commercial découverte par le mandant après la cessation des relations contractuelles.
Jusqu’alors, la faute grave de l’agent commercial commise avant la rupture mais révélée au mandant après cette dernière, était privative de l’indemnité de cessation de mandat en application de l’article L134-13-1 du Code de Commerce, peu important qu’elle n’ait pas été mentionnée par le mandant dans la lettre de résiliation (Cass. Com. 14 février 2018, n° 16-26037 ; 24 novembre 2015, n° 14-17747 ; 1er juin 2010, n° 09-14115 ; 15 mai 2007, n° 06-12282). Mais cette jurisprudence contrevenait aux principes édictés par l’article 18 de la Directive du Conseil du 18 décembre 1986 relatifs à la coordination des droits des Etats membres concernant les agents commerciaux indépendants (86/653/CEE) en vertu desquels les faits fautifs privatifs d’indemnité sont ceux qui justifient la résiliation sans délai du mandat d’agence commerciale par le mandant. Sachant que les termes de la Directive sont d’interprétation stricte, admettre que la faute grave de l’agent commercial découverte après la rupture pouvait être privative d’indemnité, sans avoir par conséquent motivé cette rupture de la part du mandant, revenait à créer une cause de déchéance de l’indemnité non prévue par l’article 18 de la Directive.
C’est pourquoi la chambre commerciale de la Cour de Cassation, par son arrêt du 16 novembre 2022 annonce expressément qu’elle renonce à sa jurisprudence antérieure, par des attendus qui méritent une pleine approbation : « En considération de l’interprétation qui doit être donnée aux articles L134-12 et L134-13 du Code de Commerce, il apparaît nécessaire de modifier la jurisprudence de cette chambre et de retenir désormais que l’agent commercial qui a commis un manquement grave, antérieurement à la rupture du contrat, dont il n’a pas été fait état dans la lettre de résiliation et a été découvert postérieurement à celle-ci par le mandant, de sorte qu’elle n’a pas provoqué la rupture, ne peut être privé de son droit à indemnité.
Pour rejeter la demande d’indemnité de rupture formée par la société ACOPAL, l’arrêt retient qu’il importe peu que, découvert postérieurement à la rupture, un manquement à l’obligation de loyauté ne soit pas mentionné dans la lettre de résiliation si ce manquement, susceptible de constituer une faute grave, a été commis antérieurement à cette rupture.
En statuant ainsi, la Cour d’appel a violé les textes susvisés… ».
Autrement dit, la faute commise par l’agent commercial avant la cessation des relations contractuelles et découverte par le mandant après, ne peut être privative d’indemnité au sens de l’article L134-12 du Code de Commerce que si elle a été mentionnée dans la lettre de rupture.