Au travers d’un arrêt rendu le 2 mars 2023, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence (Farjon/ Kane International Limited, n° 2023/34) rappelle les principes applicables à la liberté d’activité de l’agent commercial.
Si du fait de sa qualité de professionnel indépendant il est loisible à l’agent commercial d’exercer parallèlement une activité salariée (Cass. Soc. 24 janvier 1969, n° 65-13808), c’est à la condition de respecter le devoir de loyauté dont il est débiteur envers son ou ses mandants. L’exercice de cet emploi salarié ne doit donc pas nuire à l’exécution des obligations découlant des contrats d’agence commerciale qu’il a préalablement souscrits.
Dans l’espèce ayant donné lieu à l’arrêt du 2 mars 2023, la société mandante avait décidé de se séparer de la totalité de son réseau d’agents commerciaux et l’agent, avant même de recevoir sa lettre de rupture, persuadé que le mandant ne lui verserait pas spontanément l’indemnité légale de cessation de mandat prévue par l’article L134-12 du Code de Commerce, avait immédiatement accepté l’emploi salarié qui lui avait été proposé par l’une de ses clientes.
Mais informé de cette situation, et afin d’échapper à son obligation d’indemniser l’agent commercial, la société mandante avait alors exploité la situation en tirant prétexte de cette représentation salariée pour rompre pour faute grave le mandat de l’agent commercial.
C’était donc l’occasion pour la Cour d’appel de rappeler que la faute grave de nature à priver l’agent commercial de l’indemnité de fin de contrat doit porter atteinte à la finalité commune du mandat d’intérêt commun et rendre impossible le maintien du lien contractuel. Elle est ainsi amenée à considérer que l’embauche en qualité de salarié n’est de nature à porter atteinte à cette finalité commune et à rendre impossible le maintien du lien contractuel que si « …elle se traduit par une incapacité de l’agent commercial à accomplir sa mission essentielle de prospection des clients, de diffusion des produits, ainsi que par une carence dans la couverture des salons et événements permettant aux mandants d’assurer une visibilité commerciale des produits dont l’agent commercial assure la promotion… ».
Constatant que la société mandante ne rapporte nullement la preuve d’une quelconque incapacité de l’agent commercial à accomplir les missions qui lui étaient confiées, elle rejette la faute grave et condamne la société mandante à verser à son ancien agent commercial les indemnités de préavis et de cessation de mandat prévues par les articles L134-11 et L134-12 du Code de Commerce.