La redéfinition de l’agent commercial découlant de l’arrêt de la CJUE du 4 juin 2020 oblige depuis deux ans et demi les juridictions françaises à vérifier, lorsque le statut d’agent commercial est contesté, si la relation contractuelle qui leur est soumise obéit aux traits caractéristiques du statut juridique de l’agent commercial.
Il arrive en effet fréquemment que la qualité d’agent commercial soit contestée par le mandant au moment où un litige survient sujet de l’indemnité légale de cessation de mandat. Si l’absence de contrat écrit est souvent l’occasion pour le mandant de dénier sa qualité à l’agent, la contestation peut survenir même en présence d’un écrit non-équivoque et la jurisprudence a donc dégagé progressivement les critères qui, à ses yeux, caractérisent la relation d’agence commerciale. Quelle que soit la qualité que les parties se sont données dans le contrat, les juges du fond, en application de l’article 12 du CPC, disposent d’un pouvoir souverain pour « …donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux, sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposées ».
Les juges doivent donc relever avec pragmatisme la commune intention des parties et la nature et la matérialité des obligations souscrites par le mandataire pour qualifier la convention d’agence commerciale, la Cour de Cassation considérant depuis le 10 décembre 2003 (n° 01-11923)que l’application du statut d’agent commercial ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties dans le contrat, ni de la dénomination qu’elles ont donné à leur convention, mais des conditions dans lesquelles l’activité est effectivement exercée. Le pouvoir de négociation de l’agent commercial étant désormais caractérisé par l’accomplissement d’actes propres à la création, au développement ou au maintien de la part de marché du mandant, les juges sont donc amenés à une analyse détaillée des actions que l’agent commercial était habilité à accomplir pour le compte de son commettant.
C’est pourquoi on assiste depuis deux ans et demi à une multiplication des arrêts de la chambre commerciale de la Cour de Cassation censurant ou approuvant les juges du fond d’avoir ou non procédé à cette analyse (Cass. Com. 17 mai 2023, n° 22-11298 et n° 21-23533 ; 12 avril 2023, n° 22-15689 ; 19 octobre 2022, n° 18-15964 ; 12 janvier 2022, n° 20-11139 ; etc.).
Ce « grand ménage » est particulièrement salutaire puisqu’il a pour effet de donner une définition de l’agent commercial enfin conforme aux réalités économiques et commerciales de notre pays.