Lorsque des entreprises qui mettent en œuvre un réseau de vente composé d’agents commerciaux sont amenées à modifier leur politique de distribution, dans des conditions ne permettant plus d’assurer aux agents commerciaux des conditions normales d’exercice, pèse sur elles une véritable obligation de résilier le contrat conclu avec leur mandataire.
Rompre ainsi la collaboration avec les agents commerciaux est de l’intérêt mutuel des parties : les commettants, déliés de leurs obligations envers les agents commerciaux peuvent librement réorganiser la vente de leurs produits ; les agents commerciaux perçoivent les indemnités prévues par les articles L134-11 et L134-12 du Code de Commerce et peuvent ainsi financer la reconstitution de leur portefeuille de représentation.
Mais il arrive parfois que des commettants refusent d’assumer les conséquences de leur décision en ne mettant pas fin aux contrats des agents commerciaux qui se trouvent alors confrontés à d’importantes difficultés pour exécuter leur mission de représentation. C’est le cas notamment des mandants qui prennent le contrôle d’une tierce société qui dispose également de sa propre force de vente, ce qui provoque immédiatement une situation de concurrence stérile et décrédibilisante entre les membres des deux forces de vente.
Cela multiplie également les risques de litiges en matière de commissions puisque en application de l’article L134-6 du Code de Commerce, l’agent commercial qui se voit attribuer un secteur géographique et/ou une clientèle déterminée peut revendiquer le paiement des commissions sur toutes les ventes faites sur son secteur géographique, même sans son intervention. Il peut donc parfaitement revendiquer une rémunération sur les ventes faites sur son secteur géographique par son homologue appartenant à la force de vente de la société absorbée.
L’arrêt de la Cour de Cassation du 30 juin 2021 (n° 19-20868) montre que ces situations peuvent même survenir à l’insu des commettants, lorsque, par exemple, comme dans l’espèce ayant donné lieu à cette décision, le responsable de l’exécution du contrat d’agence commerciale au sein de l’entreprise mandante ne résilie pas le contrat d’un mandataire devenu pourtant inutile en raison de la mise en place d’un réseau de distributeur exclusif et continue ainsi à lui verser des commissions indues pendant plus de deux ans. La société mandante s’est ainsi trouvée obligée d’engager une procédure en restitution des commissions indûment versées et en nullité du renouvellement du contrat d’agence commerciale, sans préjudice de la procédure pénale engagée pour abus de confiance complicité et recel d’abus de confiance reproché à son ancien salarié et à l’ancien agent commercial…