En vertu des principes de liberté contractuelle édictés par les articles 1102 et suivants du Code Civil, les parties au contrat sont libres de soumettre leurs relations d’affaires au statut juridique de l’agence commerciale, prévue par l’article L134 du Code de Commerce.
Mais cette liberté n’est pas absolue car elle est soumise au contrôle des juges qui disposent d’un pouvoir souverain, en application de l’article 12 du CPC, de « …donner ou restituer l’exacte qualification au fait et acte, indépendamment de celle attribuée par les parties ».
Autrement dit, et même si les partenaires contractuels ont décidé d’opter pour le statut d’agent commercial, les juges disposent d’une absolue liberté pour re-qualifier la nature juridique de la convention. La Cour de Cassation considère, depuis des années, que l’application du statut d’agent commercial ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties dans le contrat, ni de la dénomination qu’elles ont donné à leur convention, mais des conditions dans lesquelles l’activité est effectivement exercée (Cass. Com. 2 décembre 2020, n° 18-231 ; 27 septembre 2017, n° 16-11507 ; 17 février 2009, n° 07-21058 ; 20 mai 2008, n° 07-12234 ; etc.).
Le pouvoir des juges prime donc sur la liberté contractuelle des parties, ce qu’illustre parfaitement l’arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de Cassation le 19 octobre 2022 (n° 21-21378).
Dans cette affaire, la Cour d’appel de Versailles avait considéré dans sa décision du 19 octobre 2022 que la volonté clairement exprimée des parties devait prévaloir sur le contenu du contrat de sorte qu’il n’y avait pas lieu de rechercher qu’elle était la teneur exacte des prestations exécutées par la partie qui revendiquait le statut d’agent commercial. La Cour d’appel avait donc fait prévaloir la volonté des parties sur le devoir de requalification des juges du fond. Cette décision est naturellement censurée par la Cour de Cassation qui considère que « …sans vérifier les conditions dans lesquelles l’activité est effectivement exercée par [P] [X], la Cour d’appel a privé sa décision de base au regard de l’article L134-1 du Code de Commerce ».
Toute tentative des parties de soumettre improprement leurs relations au statut d’agent commercial est susceptible d’être re-qualifiée juridiquement par les juges du fond.