En raison du développement du commerce digital, de nombreux mandants n’hésitent pas à compléter leurs circuits traditionnels de vente prospectés par des agents commerciaux en diffusant leurs produits sur des sites marchands. Naturellement, ils sont parfaitement maîtres de leur politique de distribution à la condition toutefois de ne pas préjudicier à la part de marché développée et entretenue pour eux par leur réseau d’agents commerciaux.
Ainsi, leur clientèle de revendeurs pourrait, à juste titre, se plaindre d’une concurrence faussée si la puissance économique de ces sites leur permet d’obtenir de meilleures conditions d’achat et donc de revendre moins cher. De même ces ventes pourraient impacter également les agents commerciaux car, non seulement les mandants refusent souvent de les commissionner sur les ventes faites aux sites marchands, mais ils doivent subir en plus le mécontentement de leur clientèle de revendeurs ainsi que la baisse de chiffre d’affaires qui peut en découler. En principe, la situation est régie par l’article L134-4 du Code de Commerce qui fait obligation au mandant de mettre en mesure son agent commercial d’exécuter son mandat. Il doit donc s’abstenir de quelque action que ce soit qui puisse nuire à la part de marché qui est commune aux parties au mandat d’agence commerciale. Si le mandant passe outre cette obligation, les juges considèrent qu’il commet une faute grave qui lui rend imputable la fin des relations contractuelles et qui l’oblige à indemniser l’agent commercial.
C’est ce qu’a jugé la Cour de Cassation dans son arrêt du 16 novembre 2022 (n° 21-10126) en approuvant la Cour d’appel de Paris d’avoir imputé à un mandant la responsabilité de la fin des relations contractuelles en ayant relevé qu’il avait vendu « …de manière renouvelée du vin sur le site vente-privee.com, ce qui était de nature à permettre un grand mécontentement chez les producteurs de vin et à mettre fin à certaines commandes… » ce qui autorisait l’agent commercial à prendre l’initiative de la rupture de son mandat d’agent commercial sur le fondement de l’article L134-13-2 du Code de Commerce.
Les ventes aux sites marchands sont donc des techniques de commercialisation comme les autres et elles doivent, à ce titre, respecter le caractère d’intérêt commun du mandat d’agence commerciale.